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.de Sainte-Croix, leconseiller général, un homme d'une très bonne famille qui s'est mis du côté des républicains, pour de l'argent;aucune personne propre ne le salue plus.Il connaît mon oncle, à cause du gouvernement, mais le reste de mafamille lui a tourné le dos.Le maigre avec un imperméable, c'est le chef d'orchestre.Comment, vous ne leconnaissez pas! Il joue divinement.Vous n'avez pas été entendre Cavalleria Rusticana? Ah! je trouve ça idéal!Il donne un concert ce soir, mais nous ne pouvons pas y aller parce que ça a lieu dans la salle de la Mairie.Aucasino ça ne fait rien, mais dans la salle de la Mairie d'où on a enlevé le Christ, la mère d'Andrée tomberait enapoplexie si nous y allions.Vous me direz que le mari de ma tante est dans le gouvernement.Mais qu'est-ceque vous voulez? Ma tante est ma tante.Ce n'est pas pour cela que je l'aime! Elle n'a jamais eu qu'un désir, sedébarrasser de moi.La personne qui m'a vraiment servi de mère, et qui a eu double mérite puisqu'elle ne m'estrien, c'est une amie que j'aime du reste comme une mère.Je vous montrerai sa photo.» Nous fûmes abordés uninstant par le champion de golf et joueur de baccara, Octave.Je pensai avoir découvert un lien entre nous, carj'appris dans la conversation qu'il était un peu parent, et de plus assez aimé des Verdurin.Mais il parla avecA L'Ombre Des Jeunes Filles en Fleur, Volume 3 53A L'Ombre Des Jeunes Filles en Fleur, Volume 3dédain des fameux mercredis, et ajouta que M.Verdurin ignorait l'usage du smoking ce qui rendait assezgênant de le rencontrer dans certains «music-halls» où on aurait tant aimé ne pas s'entendre crier: «Bonjourgalopin» par un monsieur en veston et en cravate noire de notaire de village.Puis Octave nous quitta, etbientôt après ce fut le tour d'Andrée, arrivée devant son chalet où elle entra sans que de toute la promenadeelle m'eût dit un seul mot.Je regrettai d'autant plus son départ que tandis que je faisais remarquer à Albertinecombien son amie avait été froide avec moi, et rapprochais en moi-même cette difficulté qu'Albertinesemblait avoir à me lier avec ses amies, de l'hostilité contre laquelle pour exaucer mon souhait, paraissaits'être le premier jour heurté Elstir, passèrent des jeunes filles que je saluai, les demoiselles d'Ambresac,auxquelles Albertine dit aussi bonjour.Je pensai que ma situation vis-à-vis d'Albertine allait en être améliorée.Elles étaient les filles d'une parentede Mme de Villeparisis et qui connaissait aussi Mme de Luxembourg.M.et Mme d'Ambresac qui avaient unepetite villa à Balbec, et excessivement riches, menaient une vie des plus simples, étaient toujours habillés, lemari du même veston, la femme d'une robe sombre.Tous deux faisaient à ma grand'mère d'immenses salutsqui ne menaient à rien.Les filles, très jolies, s'habillaient avec plus d'élégance mais une élégance de ville etnon de plage.Dans leurs robes longues, sous leurs grands chapeaux, elles avaient l'air d'appartenir à une autrehumanité qu'Albertine.Celle-ci savait très bien qui elles étaient.«Ah! vous connaissez les petitesd'Ambresac.Hé bien, vous connaissez des gens très chics.Du reste, ils sont très simples, ajouta-t-elle commesi c'était contradictoire.Elles sont très gentilles mais tellement bien élevées qu'on ne les laisse pas aller auCasino, surtout à cause de nous, parce que nous avons trop mauvais genre.Elles vous plaisent? Dame, çadépend.C'est tout à fait les petites oies blanches.Ça a peut-être son charme.Si vous aimez les petites oiesblanches, vous êtes servi à souhait.Il paraît qu'elles peuvent plaire puisqu'il y en a déjà une de fiancée aumarquis de Saint-Loup.Et cela fait beaucoup de peine à la cadette qui était amoureuse de ce jeune homme.Moi, rien que leur manière de parler du bout des lèvres m'énerve.Et puis elles s'habillent d'une manièreridicule.Elles vont jouer au golf en robes de soie.A leur âge elles sont mises plus prétentieusement que desfemmes âgées qui savent s'habiller.Tenez Madame Elstir, voilà une femme élégante.» Je répondis qu'ellem'avait semblé vêtue avec beaucoup de simplicité.Albertine se mit à rire.«Elle est mise très simplement, eneffet, mais elle s'habille à ravir et pour arriver à ce que vous trouvez de la simplicité, elle dépense un argentfou.» Les robes de Mme Elstir passaient inaperçues aux yeux de quelqu'un qui n'avait pas le goût sûr et sobredes choses de la toilette.Il me faisait défaut.Elstir le possédait au suprême degré, à ce que me dit Albertine.Je ne m'en étais pas douté ni que les choses élégantes mais simples qui emplissaient son atelier étaient desmerveilles désirées par lui, qu'il avait suivies de vente en vente, connaissant toute leur histoire, jusqu'au jouroù il avait gagné assez d'argent pour pouvoir les posséder.Mais là-dessus, Albertine aussi ignorante que moi,ne pouvait rien m'apprendre.Tandis que pour les toilettes, avertie par un instinct de coquette et peut-être parun regret de jeune fille pauvre qui goûte avec plus de désintéressement, de délicatesse chez les riches ce dontelle ne pourra se parer elle-même, elle sut me parler très bien des raffinements d'Elstir, si difficile qu'iltrouvait toute femme mal habillée, et que mettant tout un monde dans une proportion, dans une nuance, ilfaisait faire pour sa femme à des prix fous des ombrelles, des chapeaux, des manteaux qu'il avait appris àAlbertine à trouver charmants et qu'une personne sans goût n'eût pas plus remarqués que je n'avais fait.Dureste, Albertine qui avait fait un peu de peinture sans avoir d'ailleurs, elle l'avouait, aucune «disposition»,éprouvait une grande admiration pour Elstir, et grâce à ce qu'il lui avait dit et montré, s'y connaissait entableaux d'une façon qui contrastait fort avec son enthousiasme pour Cavalleria Rusticana.C'est qu'en réalitébien que cela ne se vît guère encore, elle était très intelligente et dans les choses qu'elle disait, la bêtise n'étaitpas sienne, mais celle de son milieu et de son âge.Elstir avait eu sur elle une influence heureuse maispartielle.Toutes les formes de l'intelligence n'étaient pas arrivées chez Albertine au même degré dedéveloppement.Le goût de la peinture avait presque rattrapé celui de la toilette et de toutes les formes del'élégance, mais n'avait pas été suivi par le goût de la musique qui restait fort en arrière
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